OTTAWA, ON : Le Centre juridique pour les libertés constitutionnelles (CJLC) a annoncé aujourd’hui que trois églises de Colombie-Britannique ont déposé une demande d’autorisation d’appel devant la Cour suprême du Canada de la décision de la Cour d’appel de Colombie-Britannique qui a rejeté la contestation judiciaire de l’interdiction des services religieux en personne imposée par la Colombie-Britannique entre novembre 2020 et mai 2021.
Les trois églises de la vallée du Fraser considèrent chacune que le rassemblement en personne pour le culte religieux est ordonné par Dieu et qu’il s’agit d’un principe fondamental de leurs croyances. En décembre 2020, elles ont organisé des cultes en personne en respectant les mêmes protocoles de sécurité que ceux qui s’appliquaient aux autres lieux autorisés en Colombie-Britannique à l’époque. Les églises ont fait l’objet d’une surveillance policière et ont été inculpées pour avoir organisé des cultes en personne.
Le 8 janvier 2021, les trois églises ainsi qu’un organisateur des manifestations ont déposé un recours constitutionnel contre les restrictions imposées aux manifestations publiques et l’interdiction des cultes en personne dans les ordonnances de santé publique émises par la Dr Bonnie Henry, responsable provinciale de la santé publique en Colombie-Britannique.
Le gouvernement de la Colombie-Britannique a ensuite demandé, en vain, une injonction contre les églises pour permettre à la police d’arrêter toute personne soupçonnée d’avoir l’intention d’assister à un service religieux en violation des restrictions en matière de santé publique.
Le 18 mars 2021, le juge en chef Christopher Hinkson de la Cour suprême de la Colombie-Britannique a rendu une décision rejetant la contestation de l’interdiction des cultes en personne. Lors de l’audience, le gouvernement de la Colombie-Britannique a admis que l’interdiction des manifestations en plein air, en vigueur du 19 novembre 2020 au 10 février 2021, était injustifiée et la Cour l’a déclarée sans effet.
Le 31 mars 2021, un avis d’appel a été déposé auprès de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique. Les avocats des églises ont fait valoir dans leur argumentation écrite que « l’interdiction catégorique des cultes en personne ne représente pas une atteinte minimale aux droits garantis par la Charte ou ne leur donnait pas effet de la manière la plus complète possible ».
L’audience de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique s’est tenue les 29 et 30 mars 2022 et la Cour a rendu sa décision le 16 décembre 2022. La Cour d’appel a de nouveau rejeté la contestation par les églises de l’interdiction des cultes en personne.
Les avocats des églises demandent l’autorisation d’interjeter appel devant la Cour suprême du Canada au motif que la décision de la Cour d’appel soulève des questions d’importance nationale, notamment :
- La question de savoir si la constitutionnalité des ordonnances qui portent atteinte aux droits de tous les citoyens garantis par la Charte doit être traitée par la Cour comme des décisions administratives plutôt que comme une loi d’application générale;
- La question de savoir si les citoyens qui contestent la constitutionnalité de décisions administratives qui s’appliquent à tous peuvent fournir des preuves pertinentes pour déterminer si les décisions sont « manifestement justifiées dans une société libre et démocratique »;
- La question de savoir si les citoyens qui contestent la constitutionnalité de mesures contraires à la Charte ont la charge de prouver le caractère déraisonnable et l’absence de justification de ces décisions;
- La question de savoir si une province peut empêcher le contrôle judiciaire de la constitutionnalité d’ordonnances applicables à tous les habitants de la province au seul motif que ces derniers peuvent demander aux décideurs gouvernementaux de réexaminer leur décision.
Les avocats des églises ont déclaré dans leur requête que « ces décisions, qui relèvent toutes du droit administratif et non du droit constitutionnel, réduisent grandement la capacité de la Charte à protéger les droits et les libertés des citoyens ».
« Cette affaire s’est concentrée sur la question de savoir si la violation des droits de la Charte par la Colombie-Britannique était une limite raisonnable “dont la justification peut se démontrer dans le cadre d’une société libre et démocratique”, comme l’exige l’article 1 de la Charte », déclare Marty Moore, avocat des Églises. « Toutefois, cette question ne peut être traitée équitablement lorsqu’un tribunal empêche les citoyens de fournir des preuves sur la question de savoir si la restriction de leurs droits était justifiée, n’exige pas que le gouvernement justifie ses entraves aux droits garantis par la Charte et, en fait, considère que les citoyens n’ont pas le droit de contester la constitutionnalité des décrets du gouvernement qu’ils ont été accusés d’avoir violés. Nous pensons que cette affaire mérite d’être examinée par la Cour suprême du Canada afin qu’elle se penche sur ces questions fondamentales d’ordre constitutionnel au Canada ».