OTTAWA, ON : Le Centre juridique pour les libertés constitutionnelles (CJLC) est déçu par le rapport de la Commission sur l’état d’urgence (CEDU), qui a été déposé devant le Parlement aujourd’hui. Les sept semaines d’audiences ont montré que les manifestations à Ottawa et à travers le pays étaient perturbatrices, mais en grande majorité pacifiques. Les audiences ont permis de démontrer qu’elles ne constituaient pas une « menace pour la sécurité du Canada » (au sens de l’article 2 de la Loi sur le SCRS). Malgré cela, le rapport du commissaire Paul Rouleau a conclu que l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence par le gouvernement était justifiée.
En concluant que le Cabinet avait des motifs raisonnables de croire qu’il existait une situation d’urgence nationale au moment où la loi a été invoquée, le rapport du commissaire déclare : « Je ne parviens pas facilement à cette conclusion, car je ne considère pas que la base factuelle sur laquelle elle repose soit écrasante et je reconnais que les arguments qui s’y opposent sont très solides ». Dans sa déclaration publique d’aujourd’hui, il a ajouté : « Des personnes raisonnables et informées pourraient parvenir à une conclusion différente de celle à laquelle je suis parvenu ».
La CEDU est une commission d’enquête sur l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence par le gouvernement du Canada le 14 février 2022 en réponse aux manifestations qui ont eu lieu à Ottawa et ailleurs dans le pays. La Loi sur les mesures d’urgence exige qu’une enquête publique soit menée sur les circonstances de la déclaration d’urgence et sur la pertinence des mesures d’urgence prises en vertu de ladite loi. La CEDU a été constituée par décret le 25 avril 2022 et est présidée par le commissaire Paul Rouleau, juge de la Cour d’appel de l’Ontario. La CEDU a tenu sept semaines d’audiences publiques du 13 octobre au 25 novembre 2022, suivies d’une semaine de tables rondes sur les politiques publiques.
Le CJLC s’est vu accorder le statut de participant à l’enquête et a été représenté aux audiences de la Commission par les avocats Rob Kittredge et Hatim Kheir.
« À notre avis, le seuil fixé par la Loi sur les déclarations d’urgence n’a manifestement pas été atteint. Abstraction faite de la question de savoir s’il existait une “menace pour la sécurité du Canada” au sens de l’article 2 de la Loi sur le SCRS, il est clair, d’après les preuves présentées à la Commission, que les manifestations auraient pu être gérées en appliquant les lois déjà en vigueur », a déclaré Rob Kittredge, avocat du CJLC lors des auditions de la Commission.
Le CJLC a fait valoir que les circonstances qui ont conduit à l’invocation de la Loi sur les situations d’urgence n’ont pas atteint le seuil fixé dans la loi pour une déclaration d’urgence. Pour pouvoir légalement déclarer une situation d’urgence en matière d’ordre public, la loi exige qu’il y ait des « menaces pour la sécurité du Canada » (selon la définition de ce terme dans la Loi sur le SCRS), si graves qu’il s’agit d’une « urgence nationale » à laquelle aucune autre loi du Canada ne permet de répondre de manière efficace.
Le CJLC a déposé ses conclusions finales en soutenant que le gouvernement du Canada n’avait pas démontré que ce seuil était atteint et que l’invocation de la loi était donc illégale.
Le CJLC continue de financer la contestation de la déclaration d’urgence qui est actuellement devant la Cour fédérale.
Kittredge a ajouté : « Comme le commissaire l’a noté dans sa déclaration publique d’aujourd’hui, “rien dans le rapport n’est en aucune façon contraignant pour les tribunaux qui peuvent entendre des contestations juridiques de l’utilisation de la loi”. Des demandes de contrôle judiciaire de l’invocation de la loi sont en cours devant la Cour fédérale, et nous avons bon espoir que les tribunaux fédéraux parviendront effectivement à une conclusion différente ».